felice, il rentre d’une pause clope. il d’vrait pas fumer. vraiment. c’est le dernier truc à faire en ce moment. chaque clope réduit sa vie de plusieurs minutes qu’il a dit l’doc.
et quand cette personne a plus que quelques mois à vivre, tout d’suite, quelques minutes, ça prend une certaine importance.
mais felice, il s’en balec. t’façon, il s’est fait à l’idée. et de mourir, et de manquer à personne. vraiment.
c’est pas du pathos, juste une réflexion réaliste.
felice il a pas grand monde autour de lui. sa soeur, son frère. andrea. s’il peut même être considéré comme autour de lui. et puis y’a les autres.
mais les autres, il s’en balec un peu, felice.
les autres, il va pas aller d’inquiéter de leur état après sa mort. déjà qu’il s’inquiète qu’à peine de l’état des trois autres gus.
il a écrasé sa clope à l’entrée de l’hôtel felice. et il a sourit au portier en rentrant. ce sourire qu’est absolument tout sauf naturel. ce sourire qui fait froid dans l’dos plus qu’autre chose.
c’qu’est génial, c’est qu’c’est un sourire qui semble normal. à partir du moment qu’on sait pas que felice, il a plutôt tendance à faire la gueule. et que sourire, chez lui, c’est flippant. malsain, comme dirait l’autre.
felice, il s’rassoit derrière son comptoir et s’met à compter les minutes. parce que l’hôtel est vide, et qu’c’est chiant. depuis huit heures du mat qu’il est là, et il a vu passer trois personnes. trois putains de personnes. alors felice, il s’relaxe, un peu. il desserre légèrement sa cravate, détache le premier bouton d’son chemisier. et il s’pose, la tête en arrière, sur sa chaise roulante.
le genre de chaises qui tourne. qui sont géniales dans n’importe quelle occasion. sauf celles où tourner dessus est formellement interdit par la direction.
et il entend une voix, felice. un client ? non. très vite, trop vite, ses espoirs sont réduits à néant.
tristan.
un tristan qui vient emmerder le monde.
felice ouvre les yeux doucement et le fixe. heureusement qu’il est pas violent felice.
non, c’est tristan. même s’il était violent, felice, tristan s’rait la dernière personne qu’il frapperait.
il l’apprécie bien trop pour ça.
et il s’remet à parler, tristan. felice le regarde à peine. il préfère lire le magazine sur son bureau, plus intéressant. il l’écoute d’une oreille, quand même. et il sourit doucement, faiblement, à sa remarque sur al capone.
qu’il aille se faire voir au pays des eskimos.
et felice, il continue de lire le magazine. qu’est-ce que tu viens faire là ? t’as pas des devoirs à faire ? parce qu’il est petit tristan. c’est un gamin. et qu’il se moque un peu felice. parce qu’avec tristan, il peut.
il garde son regard fixé sur le bouquin, felice.
pas b’soin d'le voir tristan pour discuter avec lui. les mots, le ton, suffisent.