otto, il n’a jamais vraiment été doué en rencontres. y a des gens qui se croisent dans la rue et qui deviennent potes comme ça, dans une poignée de main, aussi simple que ça. un bonjour et tout va, ça s'enchaîne comme une mélodie, c’est beau et sympa à écouter, c’est harmonieux et ça donne de jolis couples qui finissent par se séparer. mais c’est jamais bien grave parce que ça empêche pas les gens de recommencer. une autre rue, un autre bonjour. ça s’accorde comme une guitare, c’est la magie d’une symphonie et il a même la prétention d'appeler ça la magie de la vie. pour ceux qui sont de son côté et sous la bénédiction de son étoile.  et y a otto qui rencontre les gens au détour des cadavres de l’autre côté, du côté de la rivière où les gens se rendent pour la mort, comme au royaume des désincarnés. c’est les rencontres de circonstances, deux personnes dans une pièce parce qu’elles ont pas le choix de l’être, ça lui fait pas plaisir à lui, pas plus qu’à l’autre, c’est des échanges houleux, des échanges de cris et de larmes, ça parle tout bas ou trop fort et certainement pas du dernier film sorti au cinéma. quelquefois. ça reste. et callum, il l’a rencontré comme ça. il était là, en face de lui, il était pas bien, son père venait de perdre de la vie. son rôle c’était de remplacer un collège, c’était quelques questions et il a réussi à tirer l’aiguille de la botte de foin. c’est devenu des questions peut-être plus intimes, puis une main sur l’épaule, parce qu’otto il a la main sur le coeur.
il s’inquiète. même si c’est un peu bête, pas forcément cela dit il a de bonnes raisons de la faire. mais il sait pas s’il est la bonne personne pour, est-ce que c’est pas juste lourd. et quand il a fini de se poser toutes ces questions, il prend sa décision et il met pas trop de temps à s’écouter, c’est peut-être le seul avantage que son caractère de merde lui apporte. au moins, il arrive encore à se décider. il envoie un petit message de temps en temps, il insiste, il appelle, il prend des nouvelles, au détour d’un petit verre ou d’une poignée de main, il fait comme-ci c’était normal. que c’était une rencontre banale même quand le passif fait que c’est pas le cas. il se fait le plus banal possible à son tour, remballe le flingue et le passé fumeux. il se présente sous monsieur aloisi et il arrive que ça lui plaise et que ça lui aille mieux que son costume taillé. il fait pas ça souvent,à vrai dire, chaque cas est unique et ça s’arrête souvent bien avant. il croit pas spécialement aux amitiés miracles, jusqu’à ce qu’il en ai autant besoin. jusqu’à ce que l’aide qu’il reçoit en échange, devienne presque encore plus importante que celle qu’il croit et espère donner. il se sent redevable par moment, d’autres il est juste content et pense que peut-être, c’est juste la norme entre deux adultes.
quand il va voir callum. il prend des vêtements neufs, bien repassés, qui sentent pas le tabac froid ni le parfum qui a tourné, il essaye un neuf, c’est une vielle habitude de meuf. d’ailleurs il laisse le paquet de clopes sur la table, juste les clés de son appart’ dans les poches et l’autre pour la moto. c’est sa petite virée de la semaine ou du mois, de temps en temps. depuis qu’on lui a dit qu’il faudrait qu’il affiche un sourire plus longtemps. pas cinq minutes. juste, un peu plus souvent.
le numéro de l’appart aussi il l’a enregistré, quelque part. il est un peu à l’improviste le soir mais il se doute que ça devrait pas déranger. pour l’instant, il a vu personne roder.
le coup contre la porte presque vital.
salut, j’espère que je te dérange pas, j’ai eu envie de passer, t’as rien de prévu ?
pour peu, il annoncerait bien qu’il a ramené les disneys et le pot de glace. mais il garde ce genre de fantaisies pour d’autres fois, plus approprié.
mais j’veux pas t’accaparer si t’es fatigué ou quoi...